Jérôme Conscience capture les mots comme d’autres le font des images. C’est un artiste de mots, capteur de langue.
Faire de la langue l’objet d’une proposition plastique c’est jouer d’elle en la rendant image. Mais pour que cela soit possible, pour que le mot redevienne l’image que sans doute il a été originellement, il faut prendre la langue à son propre piège, en isoler les petits travers.
Jérôme Conscience traque les jeux de mots, les incongruités où la langue se perd. Ici: « C’EST A CAUSE DE MA FAUTE », formule volée au détour d’une tirade de rue. Ca ne veut rien dire, ça veut tout dire, ça désigne notre maladresse dans la pratique pourtant constructive de notre être, de notre langue, de la langue. Elle nous porte plus que nous ne la portons, elle nous fait plus que nous ne la faisons. Mais en même temps dans ces instants où la langue se perd c’est un moment de trouble qui est isolé, de ce trouble d’où s’insinue la régénéréscence. La langue renaît là où elle se perd.
L’évolution de la langue passe par ces moments de perte et de confusion de sens, ces moments que Jérôme Conscience traque et restitue dans une typographie des plus strictes.
Et s’il lui arrive de joindre image à ses constructions c’est ce nu effilé de « MARIE COLA » où la pose oscille entre chose et lettre.
Louis Ucciani 2003